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Le
hamburger de riz
Ce
matin, j’ai participé à une visite à pied de Kyoto, mise au point par
un ancien guide et chaudement recommandée partout. Nous avons marché dans des rues peu fréquentées
par des touristes où nous avons eu l’occasion de voir quantité d’artisans
au travail. Pour les objets traditionnels comme les futons ou les parois en
papier de riz, les éventails ou les poteries, on se paie les services d’un
artisan. Parfois, il est très renommé, mais on ne le dirait pas d’après la
taille de sa boutique. Cette visite permet d’apercevoir l’attachement que
l’on porte dans certains cas à des objets que l’on considère comme
essentiels, et de comprendre pourquoi ils ont besoin d’être de si bonne
qualité. Dans cette partie de la ville, où est plantée une racine dans la
tradition, on acquiert des choses coûteuses, par exemple les kimonos ou de
belles boîtes à thé encore simplement dans leur robe de cuivre. A l’évidence,
la demande existe pour de tels produits, et l’on sent qu’ils sont destinés
à être employés. A mes yeux d’Européenne, ils sont parés de plusieurs
qualités : leur forme parfaite doit plaire à l’œil, ils relient avec
l’avant mais sont très modernes tout de même, et même s’ils ont été
faits avec tout le soin possible, il reste possible de les casser et de les
remplacer. Très différent de notre culture, où il s’agit souvent
d’accumuler, quitte à ne pas employer ensuite.
Qui
ne s’est pas déjà énervé en devant ranger son logement et en
constatant que plusieurs objets ne servent à rien, sinon à squatter
l’espace. Comment font les Japonais, qui consomment également
avec grand plaisir ? Inutile de penser qu’ici les gens ne vivent
qu’avec le strict minimum. Les touristes viennent aussi pour chercher une réponse
à cette question, s’inspirer de cet art de vivre sobre et épuré de
fioritures. Pendant ce temps, les jeunes à la télévision portent des habits
extraordinaires de mauvais goût – eux ce qu’ils veulent, c’est un peu
plus de fantaisie Il y a malgré tout quelques constantes, on
pourrait dire qu’il s’agit d’une hygiène de vie, si on n’était pas méprisant.
Comment mettre la prière au rang de l’hygiène ? Et pourtant, on prie,
des fois même assez rapidement, en rentrant de son marché. Une multitude de
temples minuscules sont là, tous prêts à accueillir ce qui fait mal. Soit sur
un papier, accroché à une branche d’un arbre, soit sur une jolie plaquette
en bois décorée, on a écrit ce qui fait souci. Purifié par le son de la
cloche, l’eau prise à la fontaine, l’encens et ou les fleurs, on reprend le
cours de sa vie un peu plus léger.
Plus
tard dans la journée, ce sera le moment du bain, une raison de plus de
s’occuper de soi. A la fin de cette promenade, je m’arrête dans un snack pour dîner et choisis un hamburger de riz. Le pain est fait à partir de galettes de riz rôties, la viande est sûrement un mélange de tofu avec quelques légumes, et le fromage a été remplacé par une feuille d’algue. Cet étrange sandwich me plaît beaucoup, et j’admire le cuisinier qui a réussi à traduire en japonais le classique cheeseburger. |